15 avril 2019

Pas d’indemnité compensatrice de préavis pour le salarié étranger licencié parce qu’il n’a plus d’autorisation de travail

Licenciée immédiatement après avoir informé l’employeur qu’elle n’avait plus d’autorisation de travail, une salariée étrangère réclamait, en référé, le versement de l’indemnité compensatrice de préavis. Or, une telle demande se heurtait à une « contestation sérieuse ».

Une salariée étrangère, ressortissante d’un État tiers à l’Union européenne, était employée par une société d’import-export en qualité d’assistance de responsable d’achat. Le 23 octobre 2015, l’intéressée avait informé l’employeur que, en application d’une décision administrative rendue deux jours plus tôt, elle n’était plus autorisée à travailler en France. Bien que l’énoncé des faits ne le précise pas, on peut imaginer que la décision en question consistait en un refus de renouvellement de l’autorisation de travail.

L’employeur avait alors licencié la salariée. Pour rappel, il est effectivement interdit d’embaucher ou de conserver à son service un étranger sans titre de travail (c. trav. art. L. 8251-1). L’employeur n’a donc pas d’autre solution que de rompre le contrat de travail, l’irrégularité de la situation du travailleur étranger constituant nécessairement une cause objective justifiant le licenciement. Sauf faute grave (ex. : production d’un faux titre de séjour), le salarié droit à l’indemnité de licenciement (cass. soc. 18 février 2014, n° 12-19214, BC V n° 56 ; cass. soc. 1er octobre 2014, n° 13-17745 D).

Dans cette affaire, le litige portait plus précisément sur l’indemnité compensatrice de préavis, dont la salariée réclamait le paiement. À cette fin, elle avait saisi le conseil de prud’hommes, mais en référé. Sa demande ne devait donc faire l’objet d’aucune contestation sérieuse, condition sine qua non pour justifier une action en référé (c. trav. art. R. 1455-5).

Or, il y avait justement contestation sérieuse. En effet, sauf exception, un salarié qui n’est pas en mesure d’accomplir son préavis ne peut pas prétendre à l’indemnité compensatrice de préavis. Tel est justement le cas du salarié qui n’a plus d’autorisation de travail (cass. soc. 14 octobre 1997, n° 94-42604, BC V n° 311 ; cass. soc. 5 novembre 2009, n° 08-40923 D). La Cour de cassation a donc approuvé la décision du conseil de prud’hommes, qui avait estimé qu’il n’y avait pas lieu à référé.

La solution aurait été différente si la salariée avait été employée en situation irrégulière. En effet, dans cette hypothèse, le travailleur étranger a droit aux indemnités de rupture (dont l’indemnité compensatrice de préavis), soit sous la forme d’une indemnité forfaitaire de 3 mois de salaire, soit directement en application des dispositions légales ou des clauses du contrat de travail si cela s’avère plus favorable (c. trav. art. L. 8252-2, 2°). Le fait que le salarié ne puisse pas accomplir son préavis n’entre pas en considération (cass. soc. 13 février 2013, n° 11-23920, BC V n° 37).

Néanmoins, dans cette affaire, les juges ont justement pris soin de préciser que ce régime particulier n’était pas applicable, dans la mesure où l’employeur avait diligenté la procédure de licenciement dès l’instant où la salariée l’avait informé du fait qu’elle ne bénéficiait plus d’une autorisation de travail. Celle-ci n’avait donc pas été employée en situation irrégulière.

Source : Cass. soc. 3 avril 2019, n° 17-17106 FPPB